7 février 2010

l'âge d’or de l’animation

Suite au best 50 de Time Out, j'ai eu envie de faire mon propre classement des meilleurs films d'animation. C'est l'occasion de revenir sur mon idée que nous vivons dans un age d'or de l'animation, allelujah.

Tout s’est passé au milieu des années 90 et, comme toujours dans l’histoire de l’art, les grands chefs d’œuvre sont arrivés tout de suite dès le début de la période, dans sa fraicheur et son immaturité technologique. Quatre sources majeures ont alimenté la révolution: Pixar (Lasseter et alii), Studio Ghibli (Miyazaki et Takahata), Aardman (Nick Park et alii), et les productions de Tim Burton et Henry Selick. A l’inverse de la tendance générale de l’industrie, il existe encore un véritable systeme de studio dans l’animation, ce qui signifie non seulement surface et sécurité financière pour monter de gros projets, capacité à planifier longtemps à l’avance mais aussi une continuité dans les talents, les styles et l’émulation créative entre les différents réalisateurs appartenant à la meme écurie.

Ces quatre ‘sources’ se sont déployées dans quatre techniques différentes: le dessin animé ‘2D’ traditionnel pour le Studio Ghibli, mais aussi - nouveauté des années 1990 -, l’animation par ordinateur (Computer Generated Images) pour Pixar et ses suiveurs ; et la renaissance de l’animation image-par-image (‘stop-motion’) en volume: personnages de plasticine (Aardman studios) et marionnettes (Burton, Selick). L’animation en volume se prête d’ailleurs naturellement à l’arrivée des technologies de captation et restitution en 3D qui vont marquer les années 2010. En termes de rendu esthétique, ma préférence va vers l’animation en volume, mais il fait chaud au cœur de voir qu’après la longue agonie artistique de Disney, il est encore possible de créer des œuvres d’art pour grands et petits selon des méthodes et dans un style graphique relativement classiques : Hayao Miyazaki et Isao Takahata. Cela veut dire que l’histoire et les personnages sont, évidemment, toujours la chose la plus importante, ce que, par contraste, quelques opportunistes du CGI (Dreamworks) ont parfois oublié.

Au commencement, donc, il faut se souvenir que le méchant magicien Walt Disney, businessman visionnaire, cynique et conservateur, mort depuis vingt ans (1966), continuait pourtant de régner sur l’industrie du ‘dessin animé’. Son monopole incontesté sur le cinéma pour enfants entrainait l’animation toujours plus bas dans une création toujours plus infantile, laide, dénuée d’humour, méprisant l’intelligence des enfants et des adultes, véhiculant une idéologie douteuse. Les années 70 donnaient le médiocre Bernard et Bianca. Le Roi Lion, le plus gros succès des années 80 symbolisait tout cela jusqu’à l’écœurement : laideur des images et de la musique, absence d’humour, idéologie reaganienne.

Et puis soudain, donc, trois coups de tonnerre: The Nightmare before Xmas (1993), Wallace & Gromit (1996), Toy Story (1995). Burton, Aardman, Pixar. Miyazaki et le studio Ghibli produisaient des longs métrages depuis 15 ans déjà mais c’est au début des années 90 (Porco Rosso 1992, Princesse Mononoké 1997) que le public occidental a commencé à le découvrir. L’originalité d’Aardman et la profondeur de Miyazaki ont été rapidement reconnues mais les critiques ont mis plus de temps à saluer la veine Pixar, qui formellement, se rapprochait plus de la source Disney (lovable characters, happy ends, family values). Le fait que Disney distribuait les films Pixar ajoutait à la confusion: puisque Disney appliquait son sceau, il s’agissait probablement de ‘films pour enfants’ mais juste en ‘images de synthèse’ comme on disait.

Je me souviens que le premier janvier 2000, à Barcelone je discutaillais avec mes copains cinéphiles sur l’idée d’un âge d’or de l’animation, leur disant que The Nightmare ou Toy Story étaient non seulement des œuvres d’art, les meilleurs films d’animation jamais produits, mais aussi des films supérieurs à la quasi-totalité des films en prise de vue ‘réelles’ produits dans les années 90. Pendant la décennie 2000, les quatre grandes sources ont continué de produire des chefs d’œuvres quasiment chaque année, et d’autres maisons, beaucoup d’autres auteurs ont bénéficié de financements toujours plus importants pour créer des longs métrages d’animation.

2009 a été une année exceptionnelle, avec pas moins de quatre films majeurs : Up (Pixar), Ponyo (Miyazaki), Coraline et The Fantastic Mr Fox de Wes Anderson. Le fait qu’un réalisateur comme Wes Anderson (que j'adore) choisisse l’animation stop-motion (que j'adore) pour adapter Road Dahl (que j'adore) et en faire une œuvre totalement personnelle, alors qu’il n’est pas un animateur de formation, était apparemment destiné à me combler personnellement. C'est aussi une nouvelle preuve que l’animation a quitté le ghetto et va continuer d’occuper une place de plus en plus importante dans la création cinématographique, dans tous les genres

Pour en revenir à l'histoire de cette révolution, l’achat de Pixar par Disney, avec les patrons de Pixar prenant de fait la direction créative de Disney, fut la consécration financière pour le principal pilier de l’âge d’or. La prochaine étape sera la consécration artistique ‘institutionnelle’.

Je prédis que verrons dans la décennie 2010 des films d’animation couronnés par les récompenses professionnelles majeures, Oscars et Palmes d’or. Si ceci n’est pas encore arrivé c’est que les professionnels du cinéma et les critiques de cinéma se rendent compte que les meilleurs films produits depuis 15 ans, quel que soit la combinaison de critères qu’on veuille considérer (succès public, qualité cinématographique, innovation technique et narrative, ou simplement une œuvre ‘qui restera’) sont pour la plupart des films d’animation. Lorsqu’on regarde la liste des Oscars en particulier depuis 10 ans, on voit que le Pixar ou le Miyazaki de cette année là était presque toujours un film supérieur au film vainqueur. Si donc on confine les films d’animation dans une catégorie secondaire c’est qu’ils rafleraient toutes les récompenses si on les comparait honnêtement aux films ‘normaux’ produits depuis 10 ans.

J’aime rappeler que Toy Story 2 eut droit à 10 lignes dans les Cahiers du Cinéma en 2002, dans lesquelles le critique condescendait à dire que ‘si le cinéma est l’art du divertissement, alors Toy Story 2 est un bon film.’ Le fait que Pixar, par exemple produise des films divertissants et accessibles aux familles et qui rencontrent un succès considérable a été longtemps difficile à avaler pour les critiques (et en écrivant cela je pense au critique gastronomique peine-à-jouir de Ratatouille).

Mes films préférés, donc:

1. Monsters Inc. by Pete Docter (2001) (Pixar)
2. The Nightmare Before Christmas by Henry Selick (1993)
3. Toy Story 2 by John Lasseter (1999) (Pixar)
4. My Neighbour Totoro by Hayao Miyazaki (1988)
5. Corpse Bride by Tim Burton (2005)
6. WALL-E (2008) by Andrew Stanton (Pixar)
7. Coraline by Henry Selick (2009)
8. Spirited Away by Hayao Miyazaki (2001)
9. Wallace & Gromit: The Best of Aardman Animation (1996) (Aardman)
10. Toy Story by John Lasseter (1995) (Pixar)
11. Snow White and the Seven Dwarfs (1937)
12. A Bug's Life' (1998) by John Lasseter and Andrew Stanton (Pixar)
13. The Incredibles (2004) by Brad Bird (Pixar)
14. Fantasia (1940)
15. Ratatouille (2007) by Brad Bird (Pixar)
16. Chicken Run by Nick Park and Peter Lord (2000) (Aardman)
17. Fantastic Mr Fox by Wes Anderson (2009)
18. Grave of the Fireflies (Hataru no haka) (1988) by Isao Takahata
19. Up by Pete Docter (2009) (Pixar)
20. Alice in Wonderland (Disney) (1951)
21. Le roi et l'oiseau by Paul Grimault (1980)
22. Ponyo by Hayao Miyazaki (2009)
23. Kirikou and the Sorceress by Michel Ocelot (1995)
24. Curse of the were-rabbit by Nick Park (2005) (Aardman)
25. Porco Rosso (1992) by Hayao Miyazaki
26. The Jungle Book (1967) by Wolfgang Reitherman
27. Les triplettes de Belleville (Belleville Rendez-vous) by Sylvain Chomet (2003)
28. Persepolis by Marjane Satrapi & Vincent Paronnaud (2007)
29. Shrek by Andrew Adamson & Vicky Jenson (2001)
30. Team America: World Police (2004)
31. The ice age (2002)
32. Flushed away (2006) (Aardman)
33. Cinderella (1950)
34. James and the Giant Peach by Henry Selick (1996)

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